Je suis Nadine Levratto, économiste, directrice de recherche au CNRS et je travaille principalement sur les relations entre les entreprises, les territoires et les disparités territoriales. Nadine Levratto est intervenue le 8 novembre dans notre dernier Atelier des Métamorphoses, intitulé "Amour et désamour des métropoles".
Amour et désamour des métropoles.. Que vous évoque ce titre ?
"Je trouvais intéressant d'essayer de combiner des éléments qualitatifs comme ceux qui sont véhiculés par les termes amour et désamour et des éléments quantitatifs comme ceux que j'ai l'habitude de manipuler et finalement ça fonctionne assez bien puisqu'on retrouve à travers les tensions, les inégalités ou bien plus positivement la production de richesses, la cohabitation de diverses activités, les deux thématique amour et désamour des métropoles."
Quelles relations la ville et l'industrie devraient elles entretenir ?
"La ville et l'industrie c'est une vieille histoire d'amour justement puisque quand on regarde l'évolution des villes depuis l'Antiquité, le Moyen-Âge et bien, les villes produisent une partie de leurs moyens de subsistance et la spécialisation des fonctions résidentielles et productives finalement est assez récente quand on regarde l'histoire et a été très fortement accentuée par la pression des promoteurs d'une part, la hausse du prix du foncier de l'autre qui ont conduit des élus à valoriser leurs territoires à travers la construction de logements qui permettaient de maximiser la rente foncière. On voit aujourd'hui les effets délétères de ce type de politique puisque ça conduit à une ségrégation spatiale très poussée et remettre du productif en ville, préserver les activités productives qui existent encore, c'est une façon d'abord de rapprocher l'offre et la demande de travail, de rendre les villes plus confortables pour les habitants en réduisant les temps de transport, c'est écologique puisqu'on limite la globalisation des processus de production et on réduit les émissions de CO2 puisqu'il y a justement moins de transport. Pour cela, il faut rendre les villes accueillantes pour l'industrie en les aménageant de façon telle qu'il n'y ait plus de concurrence mais au contraire cohabitation entre les deux fonctions."
Qu'est-ce qu'une ville productive ?
"Une ville productive c'est une ville qui accueille des activités de production. Il ne faut pas confondre la ville productive telle que nous la définissons notamment avec la chaire Ville, Industrie et Transition Ecologique qui est une ville qui accueille des activités de production consommatrices d'espace et les tiers lieux type fablab, hôtels pour auto-entrepreneurs qui au contraire parient sur des activités économiques à toute petite échelle. La ville productive c'est une ville qui est capable d'accueillir des moyennes entreprises avec des salariés, des machines, qui ont besoin de foncier, d'accumuler du capital, qui consomment de la voirie, de l'eau et différents types de services publics. Ces activités doivent pouvoir être enchâssées dans les sites de résidence des habitants ce qui veut dire qu'il faut contrôler d'un point de vue environnemental les activités, que les riverains soient en sécurité, que les nuisances qui sont obligatoirement générées par l'industrie soient contrôlées. Une ville productive c'est finalement une ville qui arrive a concilier des politiques environnementales, des politiques industrielles et des politiques sociales."
Les Ateliers des Métamorphoses est le rendez-vous de prospective d'Eau de Paris
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